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vendredi 24 juin 2022

L’évènementiel fait sa révolution


Epaulé par les collectivités, le secteur événementiel lance des défis sur la qualité, la mutualisation, le « phygital » mix de digital et présentiel. L’œil rivé sur les finances.


Après la crise, le tourisme d'affaires se réinvente et les territoires jouent la carte d'un autre tourisme
Une étude prospective de la filière MICE ­(Meetings Incentives Conferences Exhibitions), à l’horizon 2025 (1), sur l’évolution et la transformation du secteur événementiel prévoit une « baisse globale du voyage d’affaires », tempérée par « un besoin de retisser des liens distendus par les confinements et le télétravail » qui conduit, comme elle l’avait anticipé et avec les effets de report, à « une surchauffe temporaire du secteur en 2022 ». L’étude MICE table sur une dégradation de l’économie des salons, avec « des formats plus courts, une diminution des surfaces louées et une concurrence accrue des destinations ».

Jazz et convivialité
L’étude pressent « une prépondérance de la qualité, justifiant l’événement physique, sur la quantité ». Les professionnels iront donc vers des « infrastructures plus conviviales misant sur la lumière naturelle, la décoration et la végétalisation ». La qualité, c’est aussi le choix de thématiques adaptées.

A Antibes, l’office de tourisme et des congrès, gérant par ailleurs le festival de jazz, propose une touche « jazzy » lors des congrès avec des affiches ou la présence de musiciens. « Quand un territoire est fort dans un domaine, qu’il s’agisse du spatial, de l’automobile ou du médical, les événements doivent le mettre en valeur », conseille Pierre-Louis Roucaries, président de l’Union française des métiers de l’événementiel (Unimev). Cela attire davantage et peut donner envie à des entreprises extérieures de s’installer. Il revient aux collectivités de fédérer l’écosystème.

La qualité se retrouve dans les relations entre partenaires. Au palais des congrès du ­Futuroscope de Poitiers, la déléguée générale, ­Danielle ­Castan, espère que « les discussions avec les agences événementielles, les traiteurs et les organisateurs, qui se sont approfondies pendant la crise sanitaire, avec plus d’écoute des contraintes de l’autre », se poursuivront.

S’il faut davantage de qualité dans un contexte baissier, des économies seront nécessaires. La mutualisation devrait progresser. Les taux de remplissage sont optimisés en accueillant d’autres types d’événements tels que des marchés de Noël, des galas, des événements sportifs ou culturels, y compris l’été, pour allonger la saison. L’hiver étant un peu plus creux, la solution peut passer par un mix avec des manifestations grand public.

Bâtiment polyvalent
La mutualisation entre public et privé fait aussi son chemin. Ainsi, à Nantes (303 000 hab.), la crise sanitaire a convaincu la Cité des congrès – société publique locale dépendant de la ville et de la métropole – et le parc des expositions –relevant de la métropole, ­exploité en délégation de service public par une société dominée par la CCI de Nantes - Saint-Nazaire – de se ­rapprocher d’ici à 2027.

Certains bâtiments sont, dès leur conception, prévus pour être mutualisés. Lille Grand Palais, ouvert en 1994, réunit palais des congrès, parc des expositions et Zénith en un seul bâtiment polyvalent s’adaptant à tout type d’événement. De son côté, « Le Paris event center [porte de La Villette, ndlr] est le palais des congrès le plus moderne et modulable d’Europe », estime ­Emmanuel Rodier.

Rénover l’existant, c’est aussi anticiper ces enjeux. En mutualisant des équipements, il est possible de proposer à chaque manifestation un lieu adapté. Ainsi, Viparis porte de Versailles, détenu à parité par la CCI Paris Ile-de-France et Unibail Rodamco Westfield depuis 2008, permet de maîtriser seul une multitude de lieux.

Avec ces rapprochements, une équipe unique de communication est plus efficace, notamment pour le remplissage. Selon Yann Trichard, président de la CCI Nantes - Saint-Nazaire, « une bonne com’, c’est 80 % du remplissage d’un salon, des projets lancés plus vite ». La mutualisation des services supports, des équipements mobiles et des ressources génère aussi des économies, tout comme celle entre structures, tel qu’à Royan (lire ci-contre). Enfin, le partage des bonnes pratiques et des informations pour optimiser les achats relève du bon sens.

High-tech et plateau TV
La crise sanitaire a boosté l’événementiel digital. L’étude MICE prévoit, à l’horizon 2025, le remplacement de certains événements d’entreprises par du 100 % digital, la crise économique n’arrangeant rien. Dans l’immédiat, les attentes des organisateurs en matière de format d’événements vers les adhérents de FCE portaient, en mars 2022, à 86,8 % sur du présentiel, à 12,5 % sur de l’hybride (appelé « phygital ») et 0,7 % sur du digital.

Selon l’étude MICE, le phygital se développera sur les congrès et les salons sans dimension sensorielle forte. Mais si les solutions les plus simples, tels que les logiciels classiques, coûtent peu cher, la qualité, elle, a un prix.

A Viparis, un prestataire a mis à disposition un studio high-tech de 1 200 mètres carrés loué 15 000 à 20 000 euros la journée. Viparis investit aussi dans les plateaux TV. Au palais des congrès d’Antibes, l’installation d’un dispositif complet avec fibre optique, matériel caméra, système de diffusion et régie centrale aurait coûté 300 000 euros hors taxes. La demande s’étant réduite après la crise sanitaire, « on a choisi d’externaliser toute demande d’hybridation », note Jean-Pierre ­Derail, directeur d’exploitation.

« L’avenir, assure Pierre-Louis ­Roucaries, c’est de construire une solution digitale distincte de l’offre physique, avec un produit attractif à la vente, une mise en scène, des infographies, des vidéos… pour une communauté élargie à faire vivre toute l’année ». La CCI Paris Ile-de-France lance une étude auprès de la clientèle internationale pour connaître ses besoins en la matière.

Mais pour les professionnels privés ou publics de l’événementiel, le digital n’engloutira pas le présentiel. Suivre un congrès sur son écran plusieurs jours durant n’est pas adapté. Les salons et congrès, ce sont aussi des rencontres, des relations partenariales, de la convivialité, des animations. Les centres de congrès ont encore de beaux jours devant eux.

Que reste-t-il des contraintes sanitaires ?
Dans l’événementiel comme dans les autres secteurs, les restrictions sanitaires ont disparu. Même si certains gestionnaires de site et organisateurs peuvent décider de les maintenir, en tout ou partie, ponctuellement.

Ainsi, à Antibes, les membres du personnel événementiel conservent leur masque, les visiteurs n’y étant, pour leur part, plus obligés. En revanche, les mesures de nettoyage et de désinfection avec des produits adaptés et la distribution de gel hydro­alcoolique continuent. Les organisateurs restent prudents et demandent parfois aux participants leur passe sanitaire ou vaccinal. Ils prévoient des conditions d’annulation dans les contrats et peuvent préconiser, comme à ­Poitiers, de moins remplir les tables, etc.

Certains avancent leur congrès à l’automne pour éviter l’hiver, plus propice au virus. Répercussion de la crise, jusqu’à il y a peu, les sollicitations étaient fréquentes à l’eurométropole de Metz, un ou deux mois précédant l’événement organisé – alors qu’auparavant, elles étaient reçues plus de un an en amont –, les participants étant devenus davantage ­attentistes et attentifs à la situation sanitaire.


Une rénovation avec des partenariats et une labellisation
Laurent-giraudLaurent Giraud, adjoint au directeur de l’office de tourisme de la CA Royan Atlantique (Charente-Maritime) (33 communes, 83 200 hab.)

L’office de tourisme (OT) communautaire Destination Royan ­Atlantique rénove en ce moment son palais des congrès, avec des atouts propres – monument historique datant des années 50, vue sur la mer imprenable, situation en centre-ville, nouvelles normes écologiques et énergétiques. « Sa fonction est quadruple. C’est, à la fois, un espace public de rassemblement social et culturel, un lieu événementiel, un centre ­d’affaires et corporate haut de gamme et un centre d’interprétation de l’architecture et du patrimoine », explique Laurent Giraud, adjoint au directeur de l’OT.

Le palais rénové jouera la carte de la mutualisation. « Il s’agit, en externe, de partenariats à développer avec les palais des congrès de La Rochelle et de Jonzac ou des centres ­d’exposition. En interne, l’accent est placé sur le pays royannais avec les salles et centres existants, les hôtels réalisant du réceptif, les gestionnaires privés tels que le Club Med La Palmyre, le ­Garden Tennis de Royan et avec la mutualisation d’événementiels ou de tournées d’artistes en programmant plusieurs dates afin d’optimiser les coûts », indique ­Laurent Giraud.

La rénovation a été réalisée en pensant au phygital. Elle prévoit des écrans dynamiques, des équipements de visioconférence, des expositions mixtes pour un investissement de 120 000 euros. L’OT et le palais ont pour objectif d’adopter une démarche qualité (label NF) qui portera sur la procédure de développement durable, la gestion des déchets, le recyclage des consommables, les commandes raisonnées auprès des fournisseurs. Le budget de rénovation est de 7,4 millions d’euros, dont 12,2 % émanent de la direction régionale des affaires culturelles, 1,3 % de la région, 10,3 % du département, et 76,2 % de la ville.

Contact : Laurent Giraud, l.giraud@royanatlantique.fr

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